vendredi 22 mai 2009

Collège d'infortune.

Depuis hier tous les enfants de France et de Navarre savent qu'il est interdit de voler des vélos, que les policiers les surveillent, qu'ils sont prêts, au péril de leur vie, à les interpeller dés le portail de l'école.

Pauvres enfants me direz-vous, oui, mais non. Les médias se gardent bien de raconter l'acceuil fait à la maréchaussée par nos jeunes têtes blondes. Combien de fois ces braves gardiens de la paix ont échappés de justesse à des lapidations à coup de fraises Tagada ? Car ces charmants bambins ne sont pas les anges que l'on veut bien nous faire croire.

Il m'est arrivé d'aller chercher mon fils à la sortie de son bahut. Pas souvent, car ayant dépassé depuis belle-lurette 15 ans, je fais figure de tâche immonde avec ma calvitie prononcée au milieu de cette marée agitée de mèches balayées.
Et mon fils, parfois, n'aime pas ce qui fait tâche...

A chaque fois, que je vois déferler cette horde d'enfants absoluement pas fatigués aprés une journée de travail, je me souviens de mon passage au collège.

De mon temps évidemment, le slim se portait au dessus du genou, le seul portable que l'on possédait était sur le dos, et on ne s'envoyait pas sur les blogs des "t'es le plus beau, j't'adooore" entre mecs, ou "je t'aime Chouchou t'es trop belle" pour les minettes, sous peine de passer pour une tarlouze mexicaine de bas étage.

Non, c'était vraiment pas pareil...

En y pensant, j’ai bien dû passé la moitié de ma vie scolaire à changer de classe. A perdre des amis dont je gagnais péniblement la confiance en leur offrant des beignets à la crème. A me retrouver comme un con en début d’année scolaire, parmi un troupeau de mômes attardés planifiant ma mort.

Mon enfance a été un véritable calvaire.
J’ai été très tôt confronté à la maladie. A 5 ans, j’ai eu les oreillons. A 6 ans, la varicelle. A 7 ans, ainsi que les 5 années suivantes à Pâques, j'ai failli perdre l’appendicite. A 8 ans, la mixomatose. A 14 ans, l’adolescence.
Il serait bien évidemment trop confortable de m’attirer votre compassion en me contentant d’énumerer les souffrances physiques qui ont jalonées mon enfance, mais le véritable fléau qui a ruiné mon enfance insouciante c'est les autres.

C’est à l’école que j’ai commencé à haïr mon prochain. Méthodiquement.

Car oui mesdames, vos rejetons sont méprisables. Ils transpirent la bêtise, ils suent la méchanceté, ils suintent la barbarie, ils dégoulinent l’inhumanité.
Hitler avait sans aucun doute conservé son âme d’enfant.

Et ceux qui prétendent qu’il est plus difficile d’aimer que de haïr sont des voyous. La haine, ce n’est pas seulement ce qui tient au chaud les moutons. La haine demande une énergie démentielle.

Ainsi, en 1983, je m’en souviens comme si c’était il ya vingt cinq ans, je haïssais de haine Stéphane L. ( c’est plus l’amnésie que le respect de sa vie privée de merde qui me conduit à abréger son nom de famille).
Je n’ai jamais pu encadrer les premiers de la classe, et par respect pour moi meme, je me suis toujours démerdé pour n’être au maximum que second. Néanmoins, je veux bien admettre qu’il puisse exister, quelque part, des personnes dont la réussite scolaire (voire professionelle) ne soit pas forcément le reflet d’un témpérament méprisable.
Mais bon, ça m’étonnerait quand même.

Mais revenons-en à nos boutons.

Stéphane L. avait des lunettes (forcément), était petit (évidemment) et seul (manquerait plus que ca). Le haïr était donc l’évidence même. Et lorsqu’il s’agissait de réciter des poèmes, Monsieur L. ne cherchait pas à faire son malin. Il y mettait l’intonation; sa voix vibrait sur l’hémistiche. Il ponctuait chaque rime en clignant des paupières, voire même par une mini-érection quand elle était riche, et il finissait dans un murmure : “Tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se noie…”
Clap. Clap. Clap.

Monsieur L, vous ne l’emporterez pas au paradis.

“Alors comme ca, t’es encore le premier de la classe ?” dit J. (c’est moi).
“Effectivement, il semblerait que tu aies la défaite amère…” me répondit L.(c'est lui)
“N’importe quoi ! ta mère c’est une pute.” répondit J. (c’est toujours moi).
“Qu’est ce que t’as dit sur ma mère ?”
N’ayant jamais été conscient de posséder des lacunes élocutoires, j’enchainais :
“t’as très bien entendu, fais pas comme si je parlais chinois, enfoiré de communiste !”
Et paf, il me colle son petit poing dans mon petit estomac. Je chois.
Il s’en va. je me relève. Je le pousse ( par derrière hein, je suis pas inconscient non plus). Et bing, il se mange l’urinoir.

On a cherché sa dent longtemps. Mais je jure qu’encore aujourd’hui, j’ai du mal a m’en vouloir.
Justice était rendue.

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